jeudi 19 janvier 2012

ARTICLE PRESSE CHIFFRE SUICIDE TIZI OUZOU ALGERIE

TIZI OUZOU -
47 suicides l'an passé
Par Aomar MOHELLEBI - Mercredi 18 Janvier 2012 sur www.lexpressiondz.com/

Ce sont beaucoup plus les hommes qui se suicident.

Pas moins de quarante-sept personnes se sont suicidées par pendaison sur le territoire de la wilaya de Tizi Ouzou durant la période s'étalant du 1er janvier au 31 décembre 2011, a indiqué hier le lieutenant C.Ghezali, responsable de la communication de la Protection civile de Tizi Ouzou.
Le nombre d'hommes qui se sont donné la mort durant cette période est élevé par rapport à celui des femmes. Le chiffre indique qu'ils sont trente-neuf hommes à avoir mis un terme à leur vie contre huit femmes. Malgré les efforts incommensurables fournis par les autorités et les services concernés, ces derniers ne sont pas parvenus à endiguer ce phénomène.
Toutefois, par rapport à l'année 2010, le nombre de suicides enregistrés dans la wilaya a baissé de manière sensible. En 2010, les services de la Protection civile ont recensé soixante-quatre suicidés dont dix femmes. Ces chiffres n'incluent pas bien sûr les tentatives de suicide ainsi que les suicides non répertoriés pour une raison ou une autre. A plus d'une reprise, la sonnette d'alarme a été tirée concernant l'augmentation des cas de suicide dans la wilaya de Tizi Ouzou mais aussi dans d'autres régions d'Algérie, notamment à l'occasion de la tenue de colloques et de séminaires, entre autres au niveau du Centre hospitalo-universitaire «Nedir Mohamed» de Tizi Ouzou. Des rencontres qui n'ont malheureusement pas servi à grand-chose puisque sur le terrain, on assiste à un véritable statu quo.
La sensibilisation sur ce genre de phénomène ne peut se faire en dehors d'une prise en charge psychologique permanente pour les cas le nécessitant. Le tabou qui entoure encore le fait d'aller consulter un psy n'est pas étranger à cette situation. Beaucoup de personnes en proie à des difficultés de différents ordres allant de la déception amoureuse, au manque de confiance en soi en passant par la solitude, les problèmes matériels, le chômage, la consommation de la drogue, etc. meurent à petit feu dans leur petit coin car bénéficier d'un soutien psychologique ou psychiatrique n'est pas donné à tout le monde. Il s'agit d'un acte qui reste mal vu dans notre société au moment où, en Occident, on parle plus de psychiatre de la famille.
Pourquoi, chaque année, le bilan fait ressortir que ce sont beaucoup plus les hommes qui se suicident? Mme Fatima Moussa Babaci, docteur en psychologie et enseignante au département de psychologie à l'université de Bab Ezzouar, confirme qu'il s'agit d'un constat valable non seulement dans la wilaya de Tizi Ouzou mais dans le reste du pays et aussi à l'étranger. Fatima Moussa Babaci nous dit qu'on ne peut pas expliquer cette spécificité par uniquement un seul ou deux critères. «Même ailleurs, c'est la même chose, les chiffres font ressortir que ce sont les hommes qui ont recours au suicide plus que les femmes», souligne notre interlocutrice. Cette dernière précise que concernant notre société, ce phénomène a trait, en partie, à l'éducation dispensée dès l'enfance. Plusieurs missions sont dévolues à l'homme comme celle de subvenir aux besoins de la famille, entre autres. Fatima Moussa Babaci souligne que l'homme se sent de ce fait plus responsable. Et quand il ne trouve pas de travail ajouté à son aptitude à supporter ou non les aléas de la vie, ce genre d'issue se dessine pour certains. La même psychologue n'omet pas de rappeler que dans notre société, on glorifie trop le rôle des hommes. Notre interlocutrice conclut que les femmes algériennes ont plus de facilité à mieux supporter les aléas de la vie quotidienne notamment par rapport à leur histoire personnelle. Quant au professeur Mostafa Bouzidi, psychiatre au CHU de Tizi Ouzou, il nous a confié que chez les femmes, les tentatives de suicide sont plus un appel au secours. D'ailleurs, d'après le Pr Bouzidi, on retrouve plus de tentatives chez les femmes. Mais, selon lui, chez les hommes, il s'agit souvent d'un passage à l'acte.